La bipolarité selon la thérapie musulmane

Dans notre communauté, parler de troubles psychiques reste encore un sujet délicat, souvent mal compris ou minimisé.

Le trouble bipolaire en particulier, avec ses montagnes russes émotionnelles, est souvent perçu comme une faiblesse de caractère, un manque de volonté ou une simple exagération.

Pourtant, derrière ces comportements instables se cache souvent une souffrance profonde, enracinée dans l’histoire personnelle de l’individu, mais aussi dans des dynamiques familiales toxiques.

Ce que la psychologie occidentale entend par bipolarité, c’est l’alternance entre des états diamétraux, entre des états d’euphorie, d’hyperactivité, de stimulation intense et des états où la personne se renferme sur elle-même, elle va rentrer en dépression pouvant même aller jusqu’à avoir des idées suicidaires.

bipolaire avec différentes émotions

Dans cet article, nous explorerons le trouble bipolaire à travers une lecture islamique et psychospirituelle, en prenant en compte non seulement les mécanismes psychologiques, mais aussi les influences invisibles comme le qarin, le trauma transmis, et le rôle crucial de l’entourage.

Car l’Islam n’est pas silencieux sur ces réalités intérieures. Allah ﷻ nous parle dans le Coran de la lutte intérieure, de l’âme instable, et du besoin vital de se purifier (tazkiya).

Le but n’est pas de poser un diagnostic, mais d’apporter un éclairage, une compréhension, et des pistes de guérison à la lumière de notre foi.

Origines du trouble bipolaire: une blessure d’identité

Le trouble bipolaire ne naît pas de nulle part.

Il s’enracine souvent dans une enfance marquée par l’instabilité affective et l’ambiguïté émotionnelle.

Le bipolaire n’a pas grandi avec des repères clairs, mais avec des signaux contradictoires. Un jour, on l’aime de tout cœur ; le lendemain, on l’ignore ou on le rejette. Un parent tendre et doux peut, sans prévenir, devenir dur et méprisant.

Cette alternance constante – amour/haine, sécurité/peur – perturbe le développement de l’identité.

👉 Exemple courant : un enfant qui reçoit des compliments chaleureux le matin (“Tu es mon trésor, je t’aime”) puis des insultes violentes en fin de journée (“Tu n’es qu’un fardeau, tu ne réussiras jamais”) grandit avec une idée instable de lui-même. Il ne sait pas s’il est digne d’amour ou source de rejet.

Dans beaucoup de cas, cette dynamique vient d’un parent lui-même fragmenté et/ou toxique, parfois ce qu’on appelle en thérapie un “parent DF” (double face plus connu sous le terme de pervers narcissique) ou d’un parent sociopathe qui a effacé son enfant au point de ne pas l’autoriser à penser par lui-même.

Ce type de parent peut incarner à la fois une figure de protection et de danger. L’enfant développe alors un attachement toxique : il aime celui qui le blesse, et il doute de celui qui le soigne. C’est dans cette confusion que se construit un “moi” sans racine.

👉 Exemple : une jeune fille peut être profondément attachée à son père, même si ce dernier a été absent ou blessant. Plus tard, elle reproduira ce modèle dans ses relations amoureuses, s’attachant à des hommes toxiques qui lui rappellent inconsciemment cette première figure et ne réalisera pas que c’est toxique pour elle, car elle a toujours connue ça.

Sur le plan spirituel, ce lien instable peut se traduire par une alternance entre foi et égarement, entre tawhid et chirk affectif.

Le parent toxique devient presque une divinité émotionnelle : on cherche à lui plaire, on redoute son rejet, on calque notre humeur sur la sienne.

Cette dépendance extrême fragilise l’âme et ouvre la porte à des souffrances spirituelles profondes.

Il faut comprendre que le bipolaire s’est construit sans personnalité propre, ou du moins il l’enfouit dans son être et construit une image pour plaire aux autres.

Il devient ce que l’on attend de lui, il s’adapte à son environnement pour survivre, au prix de sa propre vérité. Cette capacité à se modeler est une forme de survie, acquis durant l’enfance… mais elle finit par devenir une prison identitaire.

👉 Exemple : une personne peut être extrêmement pieuse et pratiquante dans une mosquée, puis totalement désinhibée et séductrice dans un autre cercle. Ce n’est pas de l’hypocrisie, mais une tentative confuse de s’adapter pour être aimée, acceptée, ou simplement ne pas être rejetée.

Pendant son enfance, le bipolaire a développé une hypersensibilité, couplée à une hyperactivité mentale et émotionnelle.

Cette capacité lui a servi à sonder sans arrêt son parent toxique: est ce le moment de le solliciter? ou ce n’est pas le moment?

Par cela il arrive à percevoir les émotions des autres.

Mais cette capacité le rend particulièrement vulnérable aux traumatismes… et parfois, sans le savoir, il devient lui-même relais de traumatisme pour d’autres, à travers l’envoi inconscient de son qarin (entité qui accompagne l’être humain et peut influencer ses pensées).

Il va avoir des troubles comportementaux qui vont traumatiser les personnes qui le côtoie.

Les différentes formes de bipolarité

Toutes les personnes dites « bipolaires » ne se ressemblent pas. Il existe plusieurs formes de bipolarité, qui se manifestent différemment selon les individus et les contextes.

Comprendre ces nuances permet de mieux accompagner, mais aussi de ne pas juger trop rapidement ce qui peut parfois sembler paradoxal ou incohérent.

a. La bipolarité absolue : l’opportuniste sincère

Ce profil vit ses deux visages de manière extrême… mais sincère.

Le fond peut changer autant que la forme, ils font d’excellents agents secrets car ils sont en capacité d’adapter leur être en fonction du contexte.

Lorsqu’il est avec vous, il est à fond : amour, dévouement, attention, foi intense.

Mais si le contexte change ou si un élément déclencheur survient, il peut tout aussi passionnément se retourner contre vous. Ce n’est pas de la manipulation calculée, mais un basculement d’intention.

👉 Exemple : un frère en Islam très engagé peut soudainement couper les ponts, vous critiquer ou même vous calomnier. Puis quelques semaines plus tard, revenir vers vous comme si de rien n’était, sincèrement désolé… et pourtant capable de recommencer.

Ce type de bipolarité est dangereux s’il n’est pas conscientisé. Dans certains cas, ces personnes peuvent glisser vers un profil DF (double face plus connue sous le nom de pervers narcissique) si elles ne sont pas encadrées.

b. La bipolarité relative : l’instabilité ciblée

Ce profil est beaucoup plus répandu. En apparence, la personne semble tout à fait “normale”.

C’est dans un domaine précis que son trouble se révèle : la foi, les relations, la motivation, la productivité…

👉 Exemples :

  • Sur le plan affectif : aimer quelqu’un intensément, puis du jour au lendemain ne plus ressentir aucun attachement. Pas sans raison, mais avec une cause souvent invisible à l’entourage.

  • Sur le plan émotionnel : passer d’une euphorie débordante à une tristesse écrasante, parfois dans la même journée, souvent une dépression longue.

  • Sur le plan religieux : période de grande ferveur spirituelle, puis éloignement, doutes, voire rejet de la pratique.

  • Sur le plan de l’énergie : très actif un jour (plein de projets, d’idées, de prises d’initiatives), puis soudainement dans la procrastination totale, l’isolement ou l’apathie.

Cette forme est plus difficile à repérer, car elle se cache souvent derrière un comportement “socialement acceptable”.

Pourtant, ces fluctuations émotionnelles pèsent lourdement sur la personne et son entourage, car elles créent un sentiment d’incohérence, d’instabilité, voire de culpabilité.

Une souffrance silencieuse qui peut s’aggraver

Il est important de comprendre que toutes les formes de bipolarité ne se valent pas en intensité ni en gravité.

Certaines personnes bipolaires arrivent à gérer leur instabilité avec une forme d’autocontrôle ou un cadre bienveillant.

Mais pour d'autres, cette alternance émotionnelle devient une véritable prison intérieure, alimentée par des blessures profondes et parfois par des comportements illicites qui viennent renforcer le mal.

Mais qu’est ce qu'i fait l’alternance entre un état et l’état diametral juste apres?

En psychologie occidentale, le trouble bipolaire est principalement attribué à un déséquilibre neurochimique dans le cerveau, notamment au niveau des neurotransmetteurs comme la dopamine, la sérotonine et la noradrénaline. Ces substances influencent l’humeur, le sommeil, l’énergie et les émotions.

Mais en réalité, le changement d’état est lié soit:

  • une pensée qui lui a rappelé ses traumas du passé, du coup cela provoque une envie de se mettre dans une bulle protectrice coupé du monde

  • le parent toxique qui pense à lui et ça génére un flux négatif avec le même besoin de s’isoler

Ces états peuvent effacer les sentiments si vous chercher à les comprendre, à les faire parler ou même les harceler.

La ou le bipolaire peut basculer dans un profil vraiment négatif c’est quand la blessure initiale n’est ni soignée ni reconnue, et qu’elle est combinée à un environnement toxique ou à des exutoires malsains (addictions, libidos malsaines, fréquentations, dépendances affectives…), le trouble peut évoluer vers un profil fatal, plus dangereux pour la personne elle-même… et pour les autres.

Quand le trouble s’aggrave : le profil fatal

Le profil fatal est le fruit d’une combinaison explosive : un passé douloureux, un environnement toxique et une absence de protection spirituelle. Ce n’est plus seulement une instabilité émotionnelle ; c’est une spirale destructrice, où la personne peut devenir à la fois victime et bourreau.

Une souffrance intense + un exutoire illicite

Le bipolaire fatal a souvent grandi avec un parent toxique – exigeant, instable, intrusif ou manipulateur. Au lieu de couper ce lien destructeur, il développe des moyens de "fuir" cette douleur… en se réfugiant dans des comportements illicites ou autodestructeurs : relations interdites, dépendance affective, hypersexualité, substances, fuite dans le virtuel, libidos malsaines, etc.

👉 Exemple : une jeune femme ayant grandi sous l’emprise d’une mère narcissique peut chercher l’amour à tout prix dans des relations toxiques, pensant qu’elle n’a de valeur que si elle plaît. Elle peut nouer des relations dangereuses ou dégradantes juste pour avoir de l’amour et de l’attention.

Un pouvoir de séduction psychique et spirituelle

Ces profils développent souvent une forte capacité de séduction mentale et émotionnelle.

Ils peuvent faire craquer les gens sans un mot, simplement par la pensée ou le regard.

Leur douleur, leur énergie, leur intensité touchent directement l’âme de l’autre… mais pas toujours pour le bien.

Sans le vouloir, ils deviennent relais de toxicité : leur qarin (le diable qui les accompagne) est très actif, très connecté, et peut facilement transmettre des états lourds aux personnes sensibles.

Il est courant qu’ils perturbent spirituellement des personnes saines simplement par contact ou par pensée et peut les déstabiliser, générant du désir pour le bipolaire fatal alors qu’il n’y a eu aucun contact avec la personnes concernée.

On les reconnait au fait que le bipolaire fatale a toujours des personnes qui se retournent sur eux, même sans être dans un état de seduction, mais ils sont attirants plus que la normale.

exemple: Deux copines marchent ensemble dans la rue mais des hommes se retournent toujours sur l’une d’entre elle alors qu’elle ne fait rien d’apparence pour attirer le regard. Ceci la flatte quand même. Il y a de grandes chances qu’elle soit un profil fatal (croqueuses d’hommes entre autre).

Une lutte difficile contre le péché et le besoin de plaire

Ce profil souffre d’une incapacité chronique à résister au péché. Il sait que ce qu’il fait est mal, mais il n’arrive pas à s’arrêter. Il est constamment tiraillé entre la lumière et l’ombre, entre la recherche de Dieu et le besoin de validation sociale ou affective.

👉 Exemple : un frère qui multiplie les invocations et les nuits de qiyam, mais qui, le jour même, envoie des messages de séduction à plusieurs femmes. Ce n’est pas qu’il ne croit pas… c’est qu’il n’arrive pas à tenir sur la durée.

Souvent, ces profils ont été victimes d’abus ou de harcèlement, ce qui les rend extrêmement fragiles, manipulables, et prêts à accepter l’inacceptable pour ne pas être rejetés. Leur parent toxique les a programmés à obéir, à se taire, à encaisser. Cela fait d’eux des proies idéales pour les PN, les pervers spirituels, ou toute personne cherchant à exercer une emprise.

Les clés de guérison spirituelle

Bonne nouvelle : même le profil le plus instable, le plus "fatal", peut guérir. En Islam, rien n’est figé. Tant que le cœur bat et que la personne est en vie, la rahma (miséricorde) d’Allah reste accessible. Mais cette guérison nécessite un cheminement conscient, parfois douloureux, mais profondément libérateur.

1. Rompre avec l’emprise du parent toxique

La première étape, c’est la coupure intérieure avec le parent toxique. Cela ne signifie pas forcément couper les liens physiques ou familiaux au début, mais briser l’idolâtrie émotionnelle.

Tant que cette figure parentale reste une référence interne dominante (peur de décevoir, besoin de validation, loyauté toxique), la personne ne pourra pas se reconstruire.

couper le lien

👉 Exemple : prendre conscience que ce parent n’est pas une divinité, mais un humain avec ses propres failles. Remettre son rôle à sa juste place. Ne plus obéir à des injonctions internes comme “tu dois souffrir pour mériter l’amour”.

A noter que le bipolaire dépend de son environnement, souvent une coupure totale est préconisée pour une guérison pérenne.

Voir notre article sur la coupure des liens de parenté

2. Cesser de relayer la souffrance aux autres

Guérir, c’est aussi ne plus transmettre la douleur. Le bipolaire non guéri alterne comportements doux et blessants, ce qui traumatise son entourage. Le vrai changement se manifeste quand il devient capable d’identifier ses bascules émotionnelles, de les verbaliser, et de ne pas les projeter.

👉 Exemple : prévenir un proche : “Je suis dans une phase où je suis très irritable. Ce n’est pas toi, c’est moi. Je préfère prendre du recul quelques jours.”

3. Comprendre la sagesse derrière le trauma

L’Islam enseigne que chaque épreuve est une éducation divine. Comprendre que le trauma n’est pas une punition, mais une invitation au retour vers Allah, transforme radicalement le vécu. Ce n’est plus “Pourquoi moi ?”, mais “Qu’est-ce qu’Allah veut m’apprendre ?”.

👉 Verset inspirant : « Peut-être détestez-vous une chose alors qu’elle est un bien pour vous » (Sourate Al-Baqara, 2:216)

4. S’intégrer à un groupe lumineux

Le bipolaire guéri a besoin d’un environnement sain, cohérent, lumineux. Il devient un excellent suiveur, puis parfois un meneur par procuration. Il n’a pas besoin d’être mis en avant, mais sa sensibilité et sa compréhension des autres le rendent précieux dans tout groupe bienveillant.

5. Canaliser son énergie et surveiller l’ennui

Le bipolaire guéri reste une boule d’énergie car il n’a plus le côté dépressif. Mais cette énergie doit être canalisée. L’ennui est son pire ennemi : il peut le faire replonger. Il doit donc créer une routine qui allie spiritualité, créativité, liens sociaux et discipline.

👉 Exemple : s’investir dans un projet associatif, faire du sport régulièrement, maintenir des rituels de dhikr, éviter les temps morts sans structure.

Précautions pour les bipolaires en voie de guérison

Même lorsqu’un bipolaire entame un véritable chemin de guérison, il reste vulnérable. Les blessures anciennes, sa dépendance à l’environnement qui l’entoure, l’hyperémotivité, et la mémoire traumatique font que la rechute est toujours possible si certaines précautions ne sont pas prises au sérieux.

1. Se méfier du vide intérieur

L’ennui est une porte ouverte au wasswass (suggestions diaboliques), à la nostalgie toxique ou aux retours en arrière. Un bipolaire guéri doit organiser son temps, même minimalement, pour éviter l’effet "tunnel vide".

👉 Exemple : une journée sans objectif, sans contact humain et sans dhikr peut suffire à faire ressurgir des pensées destructrices ou des comportements à risque.

2. Protéger son environnement

L’ambiance dans laquelle évolue un bipolaire guéri est déterminante. Il doit éviter les milieux négatifs, les personnalités toxiques, les lieux où son énergie serait absorbée ou manipulée. Cela demande parfois de renoncer à des cercles anciens, même familiaux.

3. Renforcer sa discipline spirituelle

La stabilité émotionnelle passe par une stabilité spirituelle. Maintenir des actes constants, même petits, est vital. Le Prophète ﷺ disait :
« L’acte le plus aimé d’Allah est celui qui est constant, même s’il est petit. » (Bukhari et Muslim)

👉 Exemple : prier à heure fixe, même deux prières à la mosquée par semaine, écouter des rappels qui élèvent etc…

4. Rester éveillé face à la manipulation

Un bipolaire guéri reste très manipulable. Il doit apprendre à identifier les profils PN (pervers narcissiques) ou "gourous spirituels" qui cherchent à profiter de sa loyauté ou de sa fragilité. Il a souvent été "dressé" à obéir, à plaire, à encaisser. Cela fait de lui une proie facile.

👉 Conseil : avant de s’engager dans une relation ou un projet, toujours prendre un temps de recul, consulter une personne neutre et poser des limites claires dès le départ.

Conclusion

Le trouble bipolaire, bien que complexe, n’est pas une condamnation. Lorsqu’il est compris à la lumière de la foi, il devient même un chemin de lumière. Avec l’aide d’Allah, le bon entourage, et une vraie introspection, il est possible de passer de la souffrance à la guidance.

Ceux qui ont vécu les extrêmes peuvent devenir des guides pour d’autres, non pas par supériorité, mais par expérience de la douleur et de la transformation. Le plus important est de ne jamais désespérer de la miséricorde d’Allah, et de se rappeler que toute instabilité peut devenir un tremplin… si elle est confiée au bon Médecin : Ar-Rahmān, Le Tout Miséricordieux.

La bipolarité en format vidéo

Cet article est une retranscription du contenu de la vidéo ci-dessous.


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